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La Paix, éternelle Utopie ?
Pas facile de décrypter le chaos du monde pour les spectateurs, plus ou moins lointains, que nous sommes, face aux faits tragiques qui nous submergent en avalanche via la presse, les réseaux sociaux, vraies ou fausses nouvelles… Et c’est dans ces moments-là que nous avons encore plus envie de croire...

LES SALLES UTOPIA SE METTENT AU VERT
Vous y croyez, vous, au bon sens qui voudrait que partir se bronzer les fesses à l’autre bout du monde  avec des avions Macron volant avec du bio kérozène made in France serait bon pour votre corps et la planète ? Cela ne ressemblerait-il pas étrangement au discours tenu il y a quelqu...

Justine Triet parle d’or
Il aura donc suffi de quelques mots, à peine, pour que la Ministre de la Culture, celui de l’Industrie, quelques maires et députés de la majorité, volent dans les plumes et la palme de Justine Triet, réalisatrice couronnée d’Anatomie d’une chute, sermonnant en substance : « ce n’est pas bi...

Rosmerta continue ! Vous connaissez l’histoire ? 
Depuis les débuts, et même avant, Utopia Avignon suit l’histoire de près ! Ça fait presque cinq ans qu’on vous en parle dans nos gazettes, à chaque rebondissement. Ce qu’il s’est passé depuis 2018 : réquisition citoyenne d’une école vétuste appartenant au diocèse, procès et appel...

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UN HÉROS

Écrit et réalisé par Asghar FARHADI - Iran 2021 2h08 VOSTF - avec Amir Jadidi, Mohsen Tanabandeh, Sahar Goldoost, Fereshteh Sadrorafaei... GRAND PRIX, FESTIVAL DE CANNES 2021.

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

UN HÉROSC’est le nouveau film d’Ashgar Farhadi et il vient s’ajouter à la déjà longue liste des réussites magnifiques de ce cinéaste iranien majeur. Pour les mémoires qui flanchent, on lui doit À propos d’Elly, Une séparation, Le Passé, Le Client… (disponibles en Vidéo en Poche) C’est ce qui s’appelle une œuvre en construction…

Loin de l’agitation de Téhéran, l’action prend racine à Chiraz, à deux pas de Persépolis, au plus près des sources de la culture persane. Le temps suspend son vol quelques instants, dans la beauté pure des paysages. Il ne manque que les odeurs de l’Iran… On les imagine dans ces étendues d’ocre, dans les vrombissements colorés de la ville, dans le sourire véritablement lumineux de Rahim, le héros de notre histoire – mais en est-il vraiment un ? On en douterait un peu en le voyant sortir de prison pour une permission de courte durée, radieux sous ses airs discrets qui semblent perpétuellement demander des excuses à la vie. Le voilà courant, volant presque, ivre de retrouver l’air libre, parcouru d’une joie enfantine pétillante, communicative. Sans même avoir d’indices sur la cause de sa longue incarcération, on imagine mal Rahim brigand violent, bandit de grand chemin ou agitateur extrémiste. Il nous faudra gravir en sa compagnie un vertigineux échafaudage, qui semble narguer les lois de l’apesanteur et toutes les normes de sécurité connues, avant de découvrir le fin et banal mot de l’histoire, ici, sur le monumental chantier de restauration de la tombe de Xerxès où son beau-frère l’accueille en le taquinant. Si Rahim croupit dans les geôles de la République Islamique d’Iran, c’est pour un vulgaire impayé, l’un de ceux que vous et moi pourrions bien un jour avoir sur le paletot. L’absurdité criante du système nous saute aux yeux, vicieux cercle kafkaïen, car une fois le débiteur enfermé il lui est fatalement impossible de travailler pour racheter ses dettes. À ce jeu-là nul ne saurait être gagnant, se dit-on. Plus encore qu’une Justice aveugle, ce sont les plaignants qui semblent l’être devenus, enivrés par l’omnipotence que leur octroie le régime en place, la prédominance de la loi du Talion. La vengeance a ses raisons que le bon sens ne saurait voir…

Rahim, qui entrevoit une brèche d’espoir, va une fois de plus, malgré l’échec de ses nombreuses tentatives précédentes, essayer de convaincre son inflexible créancier, Braham, qui s’avère être accessoirement son ex beau-frère. Ses quelques heures de liberté vont dès lors se transformer en course infernale contre la montre pour lui, sa sœur, le mari de cette dernière, sa délicieuse fiancée (cachée)… sous le regard hébété des plus jeunes, et en particulier de son fiston Siavah. Si son bégaiement en fait presque un petit personnage mutique, ses yeux en disent long sur sa colère rentrée, son amour absolu pour son paternel et son envie d’être à nouveau à ses côtés. Des victimes innocentes et silencieuses, il y en aura finalement peu dans ce récit savamment orchestré, qui nous attrape autant par les neurones que par les sentiments. On se rappellera qu’une des forces du cinéma d’Asghar Farhadi est de ne jamais sombrer dans un manichéisme ou un angélisme béats. Ici nul n’est intégralement gentil, pas plus qu’intégralement méchant, chacun à ses raisons, que l’on devinera parfois plus qu’on ne les comprendra. Comment jeter la pierre à ces personnages tiraillés, changeants, pétris de contradictions, d’indécisions, comme nous pouvons tous l’être ? Voilà qui les rend tout aussi détestables qu’attachants.

À partir d’un postulat minimaliste – le fait qu’en quelques instants on peut bâtir ou détruire une réputation sur un malentendu – le réalisateur tisse une fable contemporaine de très haute volée, captivante, qui nous piège dans ses ressorts tel un subtil thriller psychologique. En évitant toute forme de misérabilisme, il décortique les mécanismes d’un monde peuplé de manipulateurs manipulés et de manipulés manipulateurs, où même les institutions instrumentalisent de façon peu glorieuse la misère et les handicaps d’autrui. Un monde où les réseaux sociaux semblent être devenus une hydre sans tête, qui s’abreuve de rumeurs dévastatrices auxquelles plus personne ne peut tordre le cou. Un film magistral.