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Rosmerta continue ! Vous connaissez l’histoire ? 
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GOUTTE D’OR

Écrit et réalisé par Clément COGITORE - France 2022 1h38 - avec Karim Leklou, Jawad Outouia, Malik Zidi, Yilin Yang, Ahmed Benaïssa, Elsa Wolliaston...

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

GOUTTE D’OR« Quand la porte est fermée,
le diable disparaît.
— Je réponds au diable
dans la langue du diable
— Qui vient avec toi ?
— Personne, juste
des ombres passagères. »

Celles et ceux qui ont déjà eu la chance de découvrir le cinéma très personnel de Clément Cogitore le savent : de même qu’à la porte des Enfers il est exigé de laisser toute espérance, on ne saura trop vous recommander, à vous qui entrez dans la salle pour découvrir Goutte d’or, de lâcher prise. De mettre, en même temps que votre téléphone portable, votre indécrottable rationalité en mode « avion » et de vous laisser guider, de confiance, par le talent de conteur du réalisateur, qui sait comme personne nous emmener baguenauder sur des sentiers peu balisés, aux croisements du naturalisme documentaire, du film de genre, du légendaire et du merveilleux.



À l’ombre de Montmartre, niché dans le 18e arrondissement entre la Gare du Nord, Barbès et la Porte de la Chapelle, la Goutte d’Or est un des derniers quartiers populaires de Paris. Royaume cosmopolite de la débrouille, d’une grande mixité sociale, il abrite une délinquance extrêmement variée, plus ou moins violente, plus ou moins contenue. À la sortie des bouches de métro, au milieu des joueurs de bonneteau et des revendeurs à la sauvette, se pressent les rabatteurs de divers marabouts, mediums, sorciers, dont le florissant commerce prospère sur les malheurs de leurs contemporains. Parmi eux, Ramsès est un mage parisien, fils de mage, particulièrement charismatique qui, le croirez-vous, a le don de convoquer les esprits des défunts et de les faire converser avec les malheureux qu’ils ont abandonnés dans cette vallée de larmes. Ramsès a mis au point une martingale maligne et épatante (on vous laisse découvrir) pour gagner sa vie en épongeant dans le même geste les économies et la douleur de ses clients. Ramsès a vraiment le chic pour consoler le chaland, et sa renommée s’étend rapidement – tellement que l’informel syndicat des magnétiseurs et voyants du quartier s’en inquiète et voudrait bien le voir cantonner son activité à « un certain type de clientèle », sans marcher sur les plates-bandes des collègues. En clair, segmenter le marché de l’attrape-gogo selon des critères communautaires des plus simples : les Asiatiques aux mages asiatiques, les Africains aux marabouts africains, etc. Ce qu’en honnête commerçant le bon Ramsès refuse tout net : la rue est à tout le monde et tout le monde y a sa chance. C’est qu’il a d’autres chats à fouetter. Et notamment une bande de gamins, mineurs isolés venus de Tanger, violents et teigneux, qui tiennent le quartier en coupe réglée – et qui tournent dangereusement autour de son business. L’univers bien balisé de Ramsès bascule une nuit où la réalité rejoint sa fiction : incidemment il est comme appelé, guidé par l’un de ces gamins, celui qui lui a fauché son collier, jusqu’au chantier périphérique où il le découvre mort. Dès lors, l’escroc perd pied et, traqué, s’enfonce au jugé dans la nuit, dans les recoins sombres, inconnus, inquiétants, de son quartier.

Polar urbain sec et nerveux, le Goutte d’Or de Clément Cogitore, dont on finit par ne plus trop savoir si le titre évoque une toponymie, un bijou ou un totem, glisse en douceur avec la tombée de la nuit vers le conte fantastique. Le réalisateur dépeint, sans angélisme mais en lui rendant justice, le quartier qu’il a longtemps habité, et signe une œuvre d’une beauté tranchante. De tous les plans, Karim Leklou est impressionnant et, in fine, bouleversant en Ramsès bousculé dans ses certitudes. On savait depuis Bernard Dimey et ses Enfants de Louxor qu’il n’y a pas loin des trottoirs désenchantés du 19e arrondissement à la mystique de la Vallée des Rois. La mythologie convoquée par ce thriller social ensorcelant en est une très belle illustration.