Soutenez Utopia Palmer LA GAZETTE
(à télécharger au format PDF)

NOUS TROUVER
(et où trouver la gazette)

NOS TARIFS :
TARIF NORMAL : 8€
CARNET D'ABONNEMENT : 55€ (10 places, non nominatives, non limitées dans le temps, et valables dans tous les Utopia)
Séance sur fond gris : 5€
Moins de 18 ans : 5€

RSS Cinéma
RSS Scolaires
RSS Blog

(Quid des flux RSS ?)

EN DIRECT D'U-BLOG

Le blog des profondeurs...
(de champ)

30237
Et voilà, Vidéo en Poche c’est fini, le compteur s’arrête à 30237 copies vendues sans DRM sur clés USB ! À bientôt dans le cyberespace indépendant et surtout IRL dans les salles de cinéma :)Le 30 novembre à minuit, Vidéo en Poche a tiré sa révérence et retourne dans sa bouteille de ...

Stop Bolloré ! L'appel du collectif
Le collectif Stop Bolloré a vu le jour en décembre 2021 et rassemble des membres et des organisations de la société civile qui s’inquiètent de la concentration des médias et de l’édition en France et des dangers que cela représente pour la démocratie. Le projet du collectif, qui est poli...

Quiz des "trente dernières secondes" du n°101 au n°117
Ici sont archivées les publications du quiz des “trente dernières secondes” du n°101 au n°117   Samedi 17 avril Hier, fin N° 101. Juliette Binoche, 30 ans plus tard, et magnifique, dans un autre de ses plus beaux rôles. La musique, c’est le célébrissime Canon en ré majeur de Johann Pa...

Quiz des "trente dernières secondes" du n°51 au n°100
Ici sont archivées les publications du quiz des “trente dernières secondes” du n°51 au N°100 //////////////////////////////////////// Vendredi 26 février  Hier, fin N° 51. Saisissante. Tout comme l’est la séquence d’ouverture du film, qui montre la jungle s’enflammer sous les bombes a...

ETERNAL DAUGHTER

Écrit et réalisé par Joanna HOGG - GB 2022 1h36mn VOSTF - avec Tilda Swinton, Tilda Swinton, Joseph Mydell, Carly-Sophia Davies... Produit par A24 et Martin Scorsese.

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

ETERNAL DAUGHTERPays de Galles, une route de nuit en pleine forêt, plongée dans un épais brouillard. Pleins phares, un taxi conduit prudemment jusqu’au parvis d’un petit manoir de style gothique converti en hôtel où se présentent une femme, sa mère âgée et leur setter anglais. Dès les premiers instants, les images se chargent d’un charme énigmatique et on se délecte d’avance d’un film qu’on se plairait à croire tiré d’un recueil perdu d’Edgar Poe ou d’une nouvelle oubliée de Maupassant, avec parquet grinçant, lieux inquiétants et psychologies tourmentées… Mais s’il emprunte tous les codes liés au genre, Eternal daughter aborde pourtant l’exercice avec beaucoup de sobriété et une réjouissante singularité. La cinéaste Joanna Hogg et la merveilleuse Tilda Swinton guident patiemment le film vers un récit intime, sans à-coups ou fausses fascinations pour l’irrationnel, un conte élégant et mélancolique construit autour d’un rapport aussi pur qu’ineffable : le soin et l’amour que se portent mutuellement une mère et sa fille.

La particularité frappante du film est d’avoir confié à Tilda Swinton les deux rôles de Rosalind, la mère, et de Julie, la fille. Dans un travail de polymorphie remarquable dont elle a le secret, la comédienne installe le doute. Lorsque Julie s’approche de la réceptionniste, la sensation d’étrangeté se poursuit. L’employée ne semble pas très disposée à correctement recevoir ses nouvelles arrivantes. La réservation de Julie était précise : une chambre à l’étage, face au jardin. La réceptionniste dit n’avoir qu’une chambre au rez-de-chaussée. Pourtant, les lieux ne semblent guère fréquentés : aucune clef ne manque au tableau derrière le comptoir… Avec une persévérance distinguée, Julie obtient une chambre partagée à l’étage. Inutile de s’agacer : les deux femmes sont venues passer ici une retraite paisible de quelques jours, dans le but pour Julie de travailler sur un scénario en germe et d’offrir à sa mère un peu de repos dans ce lieu qu’elle connaît parfaitement. Car la demeure était autrefois propriété de la famille. Jeune, Rosalind y passait les vacances chez sa tante et en garde d’excellents souvenirs. Julie nourrit l’espoir que sa mère, de nature peu expansive, lui livrera quelques détails dont elle pourra se servir pour son travail d’écriture.
La première nuit ne s’avère pas très bonne et les journées suivantes peu favorables à l’inspiration de Julie. Un ensemble de phénomènes discrets planent sur leur séjour : le bruit récurrent d’une fenêtre qui claque, l’absence de tout autre résident dans l’hôtel, la fuite nocturne du chien qu’il faut partir chercher à travers le domaine, etc. La relation entre les deux femmes reste pourtant marquée par une attention et une bienveillance toujours égales. Julie fait aussi la connaissance de Bill, le majordome, qui lui confie avoir décidé de continuer à officier au château après la mort de sa femme qui, comme lui, travaillait jadis sur les lieux. A mesure que l’étrangeté des lieux prend place dans son quotidien, Julie va adopter de nouvelles perspectives sur sa conception du souvenir et sur l’attachement qu’elle porte à sa mère et aux autres.

Formellement très abouti (filmé en pellicule, travail sonore méticuleux, partition sinueuse d’Antonin Dvořák), Eternal daughter réussit à explorer un sentiment particulièrement intime – le rapport à la mère – niché au creux d’un style pourtant extrêmement codifié. Le jeu tout en dédoublements et en reflets que livre Tilda Swinton, plus que jamais insaisissable, trouve son apogée dans un épilogue aussi surprenant qu’émouvant. Artiste britannique passée tardivement au cinéma et découverte en France à l’occasion de son récent dyptique The Souvenir Part I & II, Joanna Hogg donne le sentiment de produire un cinéma qui ne connaît pas de limite. Tout n’y est que va-et-vient : du film de genre à l’introspection, du présent au passé, de l’apparent à l’invisible. Et ce qui aurait pu n’être qu’un exercice de style prend soudain la dimension d’une œuvre intemporelle sur l’amour entre deux êtres liés à jamais.