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Install-party samedi 18 juin à Tournefeuille
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DÉLICIEUX

Eric BESNARD - France 2021 1h53mn - avec Grégory Gadebois, Isabelle Carré, Benjamin Lavernhe, Guillaume De Tonquédec... Scénario d’Eric Besnard et Nicolas Boukhrief.

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

DÉLICIEUXQuelle mouche a donc piqué Pierre Manceron, le cuisinier du duc de Chamfort ? En cette fin du xviiie siècle, les maîtres-queux devaient se conformer aux désirs de leur seigneur et maître, ne jamais dévier du menu qu’on leur demandait de préparer. Quelle mouche a donc piqué Pierre Manceron pour qu’il présente, ce jour-là, une invention de son cru que personne ne lui réclamait. Au milieu de l’abondance de plats, il glisse son « délicieux », chausson de pommes de terre et de truffes, qui stupéfait les convives. D’abord charmés, ils se pâment et ne cessent de décrire leurs sensations extatiques, avant qu’un ecclésiastique ne décrète, au regard des ingrédients utilisés, que ce prétendu régal est impie. Avec cette scène d’ouverture, puissante et cruelle, et ce retournement, rituel d’humiliation qui condense à la fois la fin d’un monde décadent et la rage souterraine du peuple, Éric Besnard lance son film sur des rails solides.

Lâché par le duc de Chamfort, Pierre Manceron prend son baluchon et s’en retourne à l’humilité de ses origines, dans l’ancien relais de poste de son père, décédé, et ne veut plus entendre parler de cuisine. Jusqu’au jour où débarque une femme réclamant qu’il lui apprenne les rudiments de son art. Il la reçoit sans aménité. Mais l’obstination de l’étrange visiteuse va faire céder ses résistances et le conduire à « inventer » avec elle le premier restaurant et, donc, à poser les fondations du repas gastronomique à la française…
C’est une révolution dans la révolution. Jusque-là, seule la noblesse disposait de ces artistes de la cuisine, attachés à leur demeure, pour « nourrir » leur apparat, conforter l’apparence de leur puissance. Les repas, des banquets plutôt, ostentatoires, devenaient la scène d’un théâtre rituel où l’on se rendait perruqué, poudré, costumé avec la panoplie de son rang (noble, militaire, ecclésiastique, courtisans en galante compagnie). Et dans ce sommet de l’entre-soi, on rivalisait de mots assassins, de jugements expéditifs. Et l’on engouffrait la palanquée de plats en les commentant, jugements suspendus à l’approbation du maître de céans.

La belle réussite de ce film tient à la qualité de son scénario, au soin apporté à la lumière, au souci du détail, à la précision des gestes, aux dialogues ciselés et à l’interprétation impeccable des acteurs. Avec sa rondeur mutique et la subtilité de son jeu, économe de ses effets, Grégory Gadebois rayonne en Pierre Manceron, fier et meurtri, rugueux et attentif. Peu à peu, il s’éveille à ce qu’il porte en lui, cette somme de connaissances, aisance de la pratique, intelligence de la main, science des aliments, de leur texture à leurs saveurs, et le miracle artisanal de leur transformation. Deviens ce que tu es, semble lui indiquer cette femme complexe, aux multiples facettes, qui a beaucoup vécu et ne se déleste que peu à peu de ses secrets.
Elle aussi a soif de venger d’anciennes blessures qui rejoignent celles de son hôte. De silences en regards, un couple d’intérêts mêlés se forme, des affinités se révèlent par petites touches. Ensemble, ils modifient l’ordre du monde. Le peuple peut, lui aussi, avoir accès aux « délices » de la cuisine et découvrir un univers qui lui était interdit.
En installant son film, immergé dans la nature, sur quatre saisons, Éric Besnard travaille les clairs-obscurs d’une histoire magnifique, sensuelle et romanesque, sur fond de conflit de classes. Au seuil d’un basculement général.

(J.-C. Raspiengeas, La Croix)