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La séance du mercredi 10 avril à 20h sera présentée par Amandine d’Azevedo, maître de conférences à l’université Paul Valéry et spécialiste des cinémas indiens, et sera suivie d’une discussion

AGRA, UNE FAMILLE INDIENNE

Kanu BEHL - Inde 2023 1h50mn VOSTF - avec Mohit Agarwal, Priyanka Bose, Vibha Chhibber, Rahul Roy... Scénario de Kanu Behl et Atika Chohan.

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

AGRA, UNE FAMILLE INDIENNESi la ville indienne d’Agra, qui donne son titre au film, est mondialement célèbre pour le Taj Mahal, elle est aussi localement bien connue pour abriter le plus grand hôpital psychiatrique du pays ! Et c’est dans un véritable cauchemar humain, familial et urbain que le cinéaste propulse le spectateur avec ce film coup de poing, aussi secouant qu’audacieux.
À 24 ans, Guru (Mohit Agarwal, étonnant) est en pleine crise, comme un animal en cage. Entre angoisses et frustrations, il tente de se projeter dans la vie, espérant un avenir d’abord avec Mala, une collègue de son centre d’appels dont il est fou amoureux, puis avec une autre femme… Las, sa famille n’a pas envie que l’éventuel mariage du fils bouleverse son écosystème et surtout la structure, très symbolique, des espaces de la maison. Car le détonateur de ce cauchemar familial est la volonté du jeune homme de se construire une chambre à lui dans une habitation abritant déjà ses deux parents séparés et la seconde femme du père… Sans compter une cousine et son mari qui ont très envie d’ouvrir un cabinet dentaire dans le même espace. Dans Agra, une famille indienne, chacun rêve d’un morceau de territoire constamment revendiqué par un autre. En souhaitant simplement s’installer dans la vie, Guru met ainsi en péril l’équilibre des pouvoirs, déclenchant un grand déballage familial. Disputes homériques, menaces de suicide, hallucinations, bagarre avec un médecin, agression sexuelle : le chaos est total jusqu’à ce qu’une nouvelle donne s’opère enfin dans la famille…

Kanu Behl a été découvert en France il y a dix dans avec l’excellent Titli, une chronique indienne : il y décortiquait le quotidien d’une famille, avec une violence tragique. Explorant sans concession les bas-fonds de la ville de Delhi, il y interrogeait la notion de réalisme au sein du cinéma indien, encore trop souvent partagé dans l’imaginaire des spectateurs français entre les paillettes du cinéma populaire de Bollywood et la marque naturaliste d’un cinéma d’auteur comme celui de Satyajit Ray. Kanu Behl proposait un cinéma différent, réaliste sans être documentaire, très écrit sans perdre la force du coup de poing, terriblement sombre sans tomber dans le nihilisme. Avec ce deuxième long métrage, le cinéaste conserve cet œil observateur, plongeant le spectateur dans la dure vie de Guru, vingt ans, et ses relations conflictuelles avec sa famille dysfonctionnelle, tout en gardant la violence tragique qui devient ainsi sa marque de fabrique.
Kanu Behl explore par ailleurs les tabous d’une société indienne très patriarcale : la famille de Guru devient un miroir sociétal particulièrement asphyxiant, montrant comment les individus se détraquent face à des situations intenables. La misère, notamment sexuelle, du jeune homme au début du film, et ses tentatives d’émancipation font d’Agra, une famille indienne un film puissant, bien loin de l’écho romantique que possède le monument emblématique de la ville ; il est en effet particulièrement ironique que le Taj Mahal, décor si souvent présent pour les récits d’amour, plane sur ces ruelles et ces habitations exiguës et insalubres, où le déchirement familial a pour pendant un délabrement urbain. L’immense travail sur les lieux et les sons font d’Agra, une famille indienne un film particulièrement prenant.

Ni aimable, ni exotique, le cinéma de Kanu Behl interroge le spectateur occidental sur ses propres clichés liés à l’Inde et à sa société, décortiquant les failles et les faiblesses des êtres, à la fois comme entités individuelles mais aussi comme membres d’un groupe social. Certes un peu dérangeante, l’entreprise est passionnante.